• On passa une autre nuit dans le studio envahit par les odeurs des eaux qui charriaient toutes sortes de débris. Le lendemain de très bonne heure on vint nous avertir que les personnes étrangères à la ville allaient être évacuées vers l’aéroport. Je fis donc ma valise.

     Tante Jeanne et moi 23

    Tante Jeanne qui ne savait pas nager et avait peur de monter dans le petit bateau refusa l’évacuation. « Pars ma chérie tu seras plus utile autre part que bloquée ici ! » Je la quittais à 9 heures, le cœur plein de chagrin. La première partie du trajet se fit en canot à moteur, dont le propriétaire allait faire la navette entre l’immeuble et un endroit presque à sec.

     Tante Jeanne et moi 23

     Tante Jeanne et moi 23

    Finalement vers 17h nous fûmes une cinquantaine de personnes à attendre le bus qui allait nous emmener à l’aéroport. Deux bus arrivèrent conduits par des bénévoles, un des chauffeurs chargea toutes les valises et autres bagages dans le bus dans lequel je voulais monter. Refus catégorique, je devais monter dans le second bus. Je compris par la suite pourquoi ce refus. Le premier bus ouvrait la route, il risquait de tomber dans un trou creusé par les eaux. Le trajet jusqu’à l’aéroport se fit au pas. Dans mon bus, le chauffeur, en caleçon et chemise, conduisait pieds nus.

    Deux jours qu’il était vêtu de la sorte que voulez-vous, on a besoin de moi et c’est tout ce que j’ai pu sauver avant hier soir. »


    8 commentaires
  • Lentement mais sûrement la ville basse située le long du fleuve fut submergée par les flots. Le soir, comme je le disais dans mon précédent article, l’eau atteignit notre quartier. Nous ne restâmes pas longtemps sans craindre le pire. Un hélicoptère, tous feux allumés survola l’immeuble, on entendait le haut-parleur : « on évacue les habitants des maisons aux alentours et ceux des étages inférieurs, les autres vous ne craignez rien ».

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 22

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 22

     

    Tant bien que mal, tante Jeanne et moi, nous essayâmes de dormir mais les hurlements des chiens attachés à leurs niches nous tinrent éveillées jusqu’à ce qu’on ne les entendit plus. Les avait-on secourus, étaient-ils morts noyés ? Le lendemain matin Fairbanks était entièrement sous les eaux, l’électricité et l’eau étaient coupées, dans l’immeuble toutes les portes des studios étaient ouvertes, on se rendait visite pour mettre en commun les victuailles. Un habitant du second (3ème   aux USA) plongea dans l’eau pour chercher des bouteilles dans le bar voisin qui était sous l’eau. Il revint avec divers bouteilles d’alcool.

    Beaucoup de locataires avaient soif et pas d’eau.

    Au fur et à mesure que les plombs sautaient sur les pylônes environnants les maisons prenaient feu.

    On pariait à celle qui serait épargnée.

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 22

    Le soir l’hélicoptère se posa sur le toit et apporta quelques galons d’eau potable. Sur le parking de l’immeuble on ne voyait plus que le toit de notre voiture.


    9 commentaires
  • Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 21

    Ce jour-là, comme tous les jours depuis notre arrivée à Fairbanks, je m’étais rendu dans le vieil hôtel dont le propriétaire avait accepté d’exposer des toiles de tante Jeanne. « Mais c’est un honneur » avait-il dit. Il faut dire que Jeanne Laurence comptait parmi les personnalités de l’Alaska. Tandis qu’elle restait au studio pour peindre ou tenir salon, je tâchais de vendre ses toiles dans le lobby de l’hôtel. L’ambiance était sympa et j’y côtoyais de nombreuses personnes comme des chercheurs d’or qui venaient en ville de temps en temps. J’avais l’impression de vivre dans un film.

    Il était presque 14h, je parlais allemand avec un trappeur d’origine allemande qui vivait dans le pays depuis 50 ans à la recherche d’or. Il ne venait en ville que tous les six mois et ne savait toujours pas correctement s’exprimer en anglais, comme moi d’ailleurs. Soudain un brouhaha parcourut le hall et le propriétaire vint me dire qu’il fallait que je rentre me mettre à l’abri. L’immeuble où je logeais avec ma tante était bâti un peu en hauteur par rapport à la rivière dont le niveau montait dangereusement. Il faisait trop chaud et un glacier avait fondu en amont de Chena River qui allait sortir de son lit…

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 21

    Chena River à 14h

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 21

    17h30 l'eau arrive au bas de notre immeuble

    Je pris une dernière photo avant de rentrer. Un silence étrange s’empara de la ville suivi du vol incessant des hélicoptères. À 17h30 l’eau atteignit le bas de notre immeuble. On nous rassura en disant que les fondations étaient entourées d’un fossé qui captait les eaux au fur et à mesure. Toutefois il ne fallait pas que l’eau monte trop haut.

     


    9 commentaires
  • Sydney laurence le mari de tante Jeanne

    À travers mes articles sur tante Jeanne je vous ai parlé de sa vie en Alaska mais aussi qu’elle était marié avec Sydney Mortimer Laurence un peintre de renom. Sydney est surtout connu pour ses superbes tableaux sur l’Alaska dont je vous livre aujourd’hui deux variantes du « Duck Hunter » le chasseur de canard.

    Sydney laurence le mari de tante Jeanne

    À l’époque de la parution du livre « My Live with Sydney Laurence by Jeanne Laurence » ces tableaux appartenaient l’un au sénateur John Butrovich l’autre à la Charles Soderstrom.


    4 commentaires
  • Fairbanks ce nom fait rêver, cœur d’or de l’Alaska, à l’époque on y rencontrait des gens assez pittoresques et passionnants, d’autres plus sages, comme les amis de tante Jeanne, tous peintres ou écrivains. Celle-ci avait loué un studio dans un des rares immeubles à plusieurs étages de la ville.

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 20

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 20

    C’est d’ailleurs ce qui nous a sauvées dans la nuit du 14 août 1967. Aventure que je vous conterai plus tard. Notre séjour n’était que rencontres et fêtes entres amis. Un jour, alors qu’on prenait le petit déjeuner au restaurant au bas de l’immeuble, nos voisins de table parlaient tantôt français, tantôt anglais. Intriguée j’ai tourné la tête pour voir qui c’était, je sais ce n’est pas poli, mais dans ce coin retiré il était rare qu’on rencontre des Français. L’un d’eux portait un bonnet rouge…c’était le commandant Cousteau ! Finalement nos deux tables n’en firent qu’une. Le soir tante Jeanne recevait quelques amis.

    Souvenir quand tu nous tiens : Tante Jeanne et moi 20

    Parmi eux Rusty Heurlin, un peintre célèbre pour ses tableaux historiques, et sa compagne.


    5 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique